« Les contes sont la poésie des enfants.
Ils ne sont pas vrais, dites-vous ? – Qu’entendez-vous par là ? Qu’il n’arrive rien de pareil sur la terre ? Je crois en effet que les bottes du petit Poucet ne faisaient pas sept lieues à la fois, puisque la vapeur n’était pas inventée, et j’admets que la Belle-au-Bois-dormant n’a pas dormi cent ans, puisque dans ce temps-là on ne faisait encore ni sermons ni discours ministériels ; mais en quoi ce détail touche-t-il à la vérité des choses ?... Cependant, y a-t-il au monde des gens plus vivants et plus réels que tous ces personnages qui n’ont jamais vécu ?...
D’ailleurs, il faut bien que le goût des contes ait sa racine au plus profond de l’âme humaine, pour que ces fables, dédaignées des beaux esprits, aient résisté à tous les progrès des lumières, à tous les caprices des réformateurs. On leur jette en vain l’anathème, rien ne peut les anéantir. C’est que les contes, comme les légendes, les chansons, les proverbes, appartiennent à cette littérature anonyme, que le peuple aime, garde et propage, parce qu’il s’y reconnaît tout entier... »